Vide. Vide était-elle. La demeure, à la fois majestueuse et impressionnante, ne résonnait d’aucun son humain : pas une parole, pas un rire. Seul se percevait le bruit aigu de lames s’entrechoquant. Le long des couloirs déserts, aucune présence ne se profile. Le tintement de l’acier de plus en plus violent, provient directement du sous-sol de la maisonnée. Arrivé dans une grande salle, on peut apercevoir une silhouette entrain de se mouvoir dans la lumière. L’endroit s’associait à une salle d’entraînement  où de nombreuses armes étaient entreposées. Au milieu de cet espace on observe quelqu’un entrain de pratiquer l’escrime. La silhouette se dessine gracieusement, la personne étant en réalité une jeune femme. Celle-ci pratique une danse autant sensuelle que mortelle. Bien que seule, elle assure ses coups et maîtrise ses déplacements à la perfection. De sa main droite elle manie une longue rapière. Le bras tendu, la femme produit de simples mais parfaits mouvements de poignets. Son autre main, posée contre sa hanche gauche, suit les déplacements variés et dansants de son corps. Bretteuse accomplie, on devine à ses gestes de nombreuses années de pratique. La finesse est davantage à l’oeuvre que la force pure, ses mouvements tirant vers une technique sophistiquée que seuls les maîtres d’armes les plus réputés de l’Empire utilisaient.
Un geste sec, elle ramène son arme à la hauteur de son visage. Une révérence, puis essoufflée elle remet sa rapière dans son fourreau.

Rangeant son équipement, elle se dirige alors vers les escaliers. En traversant la maison, elle déboutonne le haut de son chemiser afin de s’aérer. Une fois dans ses appartements, la jeune femme  commence à se faire couler un bain. Ôtant toute passerelle de vêtement, elle se glisse doucement dans l’eau gelée. La morsure du froid lui fait se mordre la lèvre, mais profitant de la fraîcheur du liquide, elle se laisse couler entièrement, jusqu’à que son corps soit complètement recouvert.
Puis fermant les yeux, elle pénètre dans un état de semi-conscience.
Son esprit arpente les Spires. La porte de l’Imagination lui étant ouverte, elle se promène dans les chemins entremêlés qui s’offrent à elle. Sans difficulté elle se visualise dans la pièce lui servant de salle de bain. La couleur de l’eau est translucide, au plus profond de son esprit elle dessine de la chaleur. Le feu en son âme vit à travers chaque être vivant. Un dessin abstrait et pourtant si distingué. Basculant dans la réalité, son œuvre s’accomplit et peu à peu ses membres se voient réchauffés par l’eau désormais à température ambiante. Parfaitement adapté à sa chaleur corporelle, la chaleur lui caresse les sens. Elle se sens renaître.

De longues minutes s’écoulèrent. Dans son esprit la jeune femme se remémore des souvenirs passés. Elle se revoit devant ce bout de tissu, âgée d’à peine dix-huit printemps au moment de son analyse, elle se souvient de la stupeur de son père devant le résultat. Sa famille n’avait jamais compté de grands dessinateurs, pourtant elle-même y faisait exception. Ses cercles de Pouvoir et Créativité étaient en quasi-superposition l’un à l’autre, de taille raisonnable ils occupaient la moitié du tissu. Mais le plus impressionnant restait cet énorme cercle rouge, celui-ci désignant sa Volonté, occupait toute la surface de la toile, touchant ses extrémités. Les deux autres cercles paraissaient insignifiant par rapport à leur congénère, mais il en demeurait pas moins qu’un grand pouvoir résidait en la jeune demoiselle.
L’analyste notait un pouvoir non négligeable, promettant un avenir riche de promesses. Son père, bien que fière, ne voyait pas les choses de la même façon. Même si la jeune femme entrerait à l’Académie l’année suivante, son destin n’était lié que de loin au Dessin.

D’un coup, les derniers rayons de soleil paraissent à la fenêtre. Un mouvement dans l’eau et la demoiselle se lève. Enfilant une robe longue, elle enfile des bijoux et monte ses cheveux avec un lacet en cuir. À la porte d’entrée une présence se manifeste. Un sourire s’étira sur le visage d’Ashlee Hil’Muran.

« Que le jeu commence ... »
         

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