Et s’il était riche ?

S’il était riche, ses cheveux bruns sentiraient la rose et le jasmin, ils seraient soigneusement attachés en chignon et leur longueur serait régulière. S’il était riche, ses yeux couleur de l’ambre scintilleraient comme des diamants sur son visage bronzé. S’il était riche, il arborerait son sourire brillant comme le soleil chaque jour et dégagerait une confiance en lui et une bien-aisance absolue. S’il était riche, il mettrait de jolies chemises le dimanche pour aller sur le marché. S’il était riche, il n’aurait pas besoin de cette couverture rouge et or qui ne le quitte jamais. S’il était riche, il laverait...Non mieux, il ferait laver ses vêtements par la servante de son domaine. Ses vêtements seraient toujours propres.
Mais il n’est pas riche. Et il semble être destiné à rester dans ces vêtements sales, dans cette veste noire maintenant trop petite, son t-shirt originairement blanc et le pantalon de sieur Larnaqueur, volé sur une étale il y a maintenant un petit moment.

Condamné à rester un gamin des rues, sale, orphelin et voleur.

Et s’il arrivait à se ressembler ?

S’il y arrivait, il rirait comme les autres adolescents, il aurait des amis et il raconterait des histoires de dragons et de chevaliers au courage sans faille aux plus jeunes. Il serait devenu l’un de ces héro au coeur vaillant. Il aurait, du haut de ses dix-sept ans, sauvé un orphelin de la misère, il ne ferait pas que rêver de cette liberté que chacun semble posséder. Il en serait le maître. Il volerait au dessus des nuages et dominerait ceux qui, en ce moment, le maintiennent couché sur le sol crasseux des rues d’Al-Jeit. Il ne penserait plus à s’il pourra manger demain, mais plutôt à comment il a fait pour se sortir de cette vie de misère. Il en serait déjà loin. Il serait déjà loin de la capitale, fier sur son étalon noir parcourant les routes de Gwendalavir.
Mais il n’est qu’un gamin des rues, sale, orphelin et voleur. Depuis maintenant… Comment savoir ? Il ne se souvient même plus de ses parents. Il a toujours vécu dans un caniveau. Pourquoi ça pourrait changer ? Peut importe ce qu’il fait, il ne change pas. Toujours obligé de voler, parce que personne ne veut employer un voleur. C’est un cercle fermé. La vie n’est pas drôle. Elle l’est peut être pour certains, mais pas pour lui. La mort n’est pas non plus une solution. Il a bien sûr abandonné l’idée que ses parents reviendront le chercher, il n’est pas naïf, mais s’il n’y a ne serait-ce qu’une seule petite chance pour qu’il puisse se sortir de cette bouche d’égout, il la saisira. A deux main. Si une main se tend vers lui pour l’aider à remonter vers la lumière, alors il s’agrippera de toutes ses forces.

Et si, pour une fois, les choses tournaient dans son sens ?
Oui, une main l’a finalement sorti de ce trou. Une main l’a redressé et pris sous son aile. Une main a décidé, -sûrement pas par charité- de s’occuper de lui.

Les parents de Naël, des alaviriens standards, n’ont pas choisi l’abandon de leur fils. Ils l’aimaient et passaient le plus clair de leur temps avec lui. Ils n’ont pas eu le choix de le laisser à Al-Jeit alors que la Grande Guerre les envoyait combattre les mercenaires. Ils ont compté sur la bonté des gens pour s’occuper de lui. Mais les gens ne sont pas tous aussi bon qu’on le pense ou qu’on le voudrait. Personne n’a fait attention à lui plus qu’aux autres enfants des rues.
Il s’est donc débrouillé seul. D’abord… Désorienté, perdu, complètement seul il n’a pas vraiment compris. Puis la faim l’a fait réagir. Il devait trouver une manière de s’alimenter. C’est un groupe de garçons dans la même situation que lui qui lui a montré, malgré eux, comment voler. Il a alors commencé sa carrière de hors-la-loi. Uniquement dans le vol, il n’avait pas d’autre choix pour survivre. Il avait établi domicile dans une caisse creuse d’une ruelle sombre de la capitale et y passait ses nuits, et presque toutes ses journées. Les reste du temps, il visitait la ville, si bien que maintenant, il en connaît une belle partie. Une seule personne a osé lui témoigner de l'attention. C'était une jeune femme Faël, anicienne propriétaire du collier qu'il porte constamment. Malheureusement elle n'était que de passage, et il s'est vite retrouvé de nouveau seul, jusqu'à ce qu'un chiot qu'il décide de nommer Daemon, pointe son museau et s'attache à lui. L'animal a réussi à se faire une place dans sa vie, et à éloigner un peu la solitude.  

Mais la solitude et l’ennui, le vol et la méprise des autres, tout cela est terminé pour lui. Maintenant, il est apprenti Marchombre. Et si sa vie commençait enfin ?