Süraby et Elundrïl progressaient sur les plateaux d’Astariul depuis prés de deux heures. Elle était consciente du danger, et elle avait toujours fait en sorte de contourner ces lieux particulièrement escarpés. Seulement après avoir perdu son temps à chercher un passage praticable pour traverser l’Ombre elle souhaitait se rendre le plus rapidement possible en ville, c'est-à-dire avant la tombée de la nuit. De plus elle n’avait qu’un court trajet à effectuer pour en sortir. Ce fut ce dernier argument qui la convaincu.
Ils marchaient donc activement. Süraby s’était détendue, elle qui au départ appréhendait de ne pas prendre le chemin habituel. Elle avait coutume de passer à Tintiane - sa ville natale - après chaque séjour en pays faël. Elle s’arrêtait donc quelques temps dans la ville des rêveurs puis repartait une fois décidée. Elle se pencha en avant et flatta l’encolure du petit pie tiédie par l’effort qu’il devait fournir dans ces terrains escarpés. Se penchant un peu plus elle frotta vigoureusement son poitrail et le petit cheval s’arrêta pour étendre l’encolure et fermer les yeux de plaisir. Une bouffée de vent frai ébouriffa son crin noir. La cavalière s’emmitoufla dans sa veste et offrit son visage à la brise d’automne. Il faisait frai, même pour cette période de l’année. Ils se remirent en marche. Si notre faëlle s’était habituée au paysage monotone qui défilait sous ses yeux, Süraby avait d’abord était choquée par l’absence totale de végétation, les pics rocheux peu amènes qui s’élevait disgracieusement vers le ciel et prenaient alors des allures de doigts crochus prêts à se refermer sur vous au moindre moment d’inattention. Il en devenait très facile de croire en la présence de goules, les lieux s’accordant à merveille avec ses créatures.
Ruminant ses charmantes pensées ils avancèrent encore, diminuant aux trois quarts la distance les séparant de la fin des plateaux. Ils perdaient cependant beaucoup de temps car Süraby refusait obstinément de passer aux allures supérieures, ne souhaitant pas blesser sa monture sur les éminences rocheuses qui saillaient du sol. Elle avait le nécessaire dans les deux sacoches tombant de chaque côté de sa selle, mais s’en servir demeurait une option à laquelle elle souhaitait échapper si possibilité il y avait. Perdue dans ses elle poussa un cri lorsque le poney fit un écart monumental. Elle eut le temps d’apercevoir un rongeur filer dans son trou. Elle leva les yeux vers le ciel cotonneux avant de tourner la tête du petit cheval vers elle :
- Ca c’est une souris, mon vieux, et sa mange pas les grosse bête comme toi...
Il s’ébroua et se remit en marche, la tête altière et levant haut les antérieurs. Ce cheval était un phénomène à lui tout seul, elle ne savait pas ce qu’elle ferait sans lui mais elle s’ennuierait probablement beaucoup. Il était vif, faisait preuve d’intelligence quand il voulait, mais c’était également une véritable tête de mule - caractère de feu propre aux poneys - aussi lorsque Süraby perdait son attention il avait la fâcheuse tendance à se transformer en authentique danger publique.
- Si tu ne marches pas normalement on va...
Le poney s’emmêla les pattes une fois de plus et manquant de désarçonner sa cavalière il se rattrapa in extrémis, un membre plier sous lui tendis que l’autre glissait en avant. Partagée entre l’hilarité et l’exaspération, elle descendit et partit devant lui, attendant patiemment que son museau vienne s’appuyer sur son épaule comme il avait coutume de faire. Elle caressa distraitement sa joue, son attention tournée vers un rocher, à leur droite. Elle n’était pas sure mais un léger bruissement semblait parvenir de l’autre côté de la pierre. Avant même qu’elle eu le temps de s’arrêter pour confirmer son hypothèse, un brûleur, sans doute alerté par les escapades des deux compères, apparu avec un air curieusement hostile. Leurs sang se glaça, l’un dont tout le corps tremblait, absolument paniqué à l’idée que le brûleur n’ai pas déjeuné et dont la seule envie était de faire demi-tour et de partir plein galop, l’autre dont le courage équivalait à cet instant à peu prés à celui du premier. Le brûleur bougea, se dirigeant droit vers le poney qui s’écarta en ruant, son hennissement affolé déchirant l’air. Süraby s’était jetée de l’autre côté pour éviter l’animal. Se redressant de toute sa hauteur, le brûleur agita ses tentacules, menaçant le pauvre cheval qui reculait petit à petit, ne souhaitant pas abandonner sa cavalière. Il n’était pas bien grand mais la faëlle ne savait pas comment parvenir à bout d’un tel monstre. Elle encocha une flèche mais son projectile ricocha sur les plaques osseuses qui protégeaient son dos. Elle observa le brûleur se tourner vers elle, horrifiée. Elle encocha une seconde flèche...