Rencontre au large des côtes de Gwendalavir(Bainas/?)
Invité
Invité
27.05.14 10:36
Assise sur un tabouret usé, Bainas contemplait la frêle silhouette qui reposait sur un hamac, dans une petite cabine du Bardanos. La jeune femme avait un sommeil agité et sa respiration était sifflante. Des gouttes de sueur perlaient à son front fiévreux. Bainas les essuya avec un chiffon humide. Maetel, la dessinatrice du navire, avait combattu l'un de ses confères et, bien qu'elle l'ait vaincu, la confrontation l'avait vidée de ses forces. Le capitaine du Bardanos se sentait responsable de l'état dans lequel se trouvait son amie. Si ses fonctions lui laissaient davantage de temps libre, elle s'occuperait personnellement de Maetel. Cependant, si l'état l'état de cette dernière s'aggravait, Bainas n'hésiterait pas une seule seconde à aller chercher un rêveur contre son gré et à le traîner jusqu'au bateau. Pour le moment, elle ne pouvait rien faire. Zero, le guérisseur attitré des pirates, avait décrété que la dessinatrice avait besoin de repos et qu'il fallait attendre que son état se stabilise. C'est donc en soupirant que le capitaine quitta la cabine pour monter sur le pont principal.
Les côtes de Gwendalavir se dessinaient à l'horizon. Une fine couche de terre s'étirait sur plusieurs centaines de kilomètres tandis que quelques reliefs montagneux se détachaient de ce paysage de plaines. Cela faisait plusieurs semaines que le Bardanos naviguait à travers le Grand Océan du Sud et, sans que l'équipage ne se l'explique, l'eau s'était retrouvée, du jour au lendemain, infestée par des œufs de grouillards. La soif devenant rapidement intenable, Bainas décréta qu'un approvisionnement d'eau à Gwendalavir, et plus précisément vers l'embouchure du Pollimage, était inévitable. Le Bardanos mis donc le cap vers le continent des Alaviriens. L'aube approchait à grands pas et le soleil dardait ses premiers rayons. Le ciel commençait à s'enflammer, nimbant de reflets dorés les voiles blanches du bateau. La jeune femme interpella ses compagnons.
- Je veux un silence complet ! Même si nous allons accoster dans une baie calme et que la majorité des habitants dort encore, nous ne devons pas courir le risque de nous faire repérer. Non, Tadashi, ne hisse pas le pavillon. Earwen, tu dirigeras l'expédition qui ira récupérer l'eau. Quant à toi, Yattaran, tu resteras à bord. Non, ne proteste pas ! Tu prendras le commandement du Bardanos pendant que j'irai explorer les environs. Je sais que ce n'est pas dans nos habitudes, mais restons discrets !
Les concernés acquiescèrent et chacun retourna vaquer à ses occupations. Le bateau fendait les flots, rythmé par le bruit de bottes crissant contre le bois. Bainas le dirigea avec dextérité dans la baie isolée. Elle maniait habilement le gouvernail afin d'éviter les nombreux rochers blancs qui se dressaient au milieu de l'eau. Bientôt, le navire mouilla au centre de la baie.
- Jetez l'ancre !
- Oui capitaine, répondit un matelot.
Des chaînes cliquetèrent en s'entrechoquant et l'ancre pénétra dans l'eau en provoquant de violents remous. Le Bardanos avança encore de quelques mètres avant de s'arrêter complètement, la chaîne tendue à l'extrême.
- Yattaran, mettez les chaloupes à la mer.
Aussitôt, trois embarcations légères, avec à leur bord moussaillons et tonneaux vides, furent descendues jusqu'à la surface de l'eau. Bainas donna ses dernières instructions avant de s'éloigner du bateau. Elle n' était pas anxieuse. Cet endroit était isolé, bien que situé à proximité de l'embouchure du Pollimage. Le risque de faire de mauvaises rencontres était faible et, dans le pire des cas, chaque pirate était armé. Le capitaine passa sa main, dans un geste familier, sur la poignée de son sabre. Celui qui lui chercherait des noises, trouverait à qui parler ! Lorsque les pirates prient pied sur la plage, la jeune femme s'adressa à ses hommes.
- Rendez-vous ici dans une heure. Earwen, pas d'imprudences, d'accord ? Ce terrain ne nous avantage pas, nous avons donc tout intérêt à rester invisible.
Le groupe se sépara alors en deux, Bainas d'un côté, les pirates devant aller chercher l'eau, de l'autre. Le capitaine avait prétexté ce travail d'éclaireur pour se retrouver seule un moment. Marcher à travers la forêt lui permettait de retrouver la sérénité qu'elle avait perdue depuis son affrontement contre le pirate Orghul. Bainas ébouriffa ses longs cheveux roux tout en rabattant son manteau rouge élimé sur ses épaules, couvrant ainsi son ample chemise blanche ainsi que son corset de cuir. Un vent froid et matinal venait de se lever et la jeune femme frissonna en s'enfonçant plus profondément dans la forêt.
Invité
Invité
29.05.14 18:49
Invité
Invité
30.05.14 11:35
Les feuilles bruissaient, créant ainsi une douce mélopée. Différente de celle des vagues et des remous, mais toute aussi apaisante. Bien que l’eau salée remplaçât le sang dans les veines de Bainas, elle éprouvait parfois le besoin de fouler la terre, de s’imprégner des odeurs d’humus et de rougeoyeur, d’herbe et de menthe poivrée. Soudain, une vague de souvenirs déferla et la frappa de plein fouet. Elle se revoyait enfant, entourée de son père de sa mère, courant à travers les plaines rocailleuses et les bois clairsemés de l’archipel des Alines. Elle se souvint ensuite d’Harlock, si impressionnant lorsqu’il maniait son sabre, si courageux qu’aucune tempête ne lui faisait peur. Lorsque la jeune femme avait perdu ses parents, il s’était comporté comme un père adoptif qui n’avait qu’un seul objectif : la rendre plus forte, pour qu’elle devienne ce qu’elle avait toujours été destinée à être, un pirate. Puis, vint le temps de la camaraderie et du partage. Equipage et capitaine. Capitaine et équipage. Complémentarité parfaite. Harmonie des hommes et de la mer.
Songeuse, elle ne sentit la présence du ou des individus qu’une poignée de secondes avant qu’ils ne se manifestent. Le calme de la forêt semblait troublé. Quelque chose était anormal, elle n’était pas seule. Ne connaissant pas l’ampleur de la menace, Bainas ne prit aucun risque inutile. Son sabre chuinta et décrivit une courbe aérienne avant de se positionner en estoc, droit devant elle. Sa garde, bien que simple, était d’une redoutable efficacité. Elle signifiait ainsi qu’elle n’était pas sans ressources et prête à en découdre.
La jeune femme rejeta ses cheveux roux en arrière, lorsqu’il apparut. Un homme qui paraissait voyager seul, bien qu’elle n’en ait pas la certitude. Bainas scruta discrètement les buissons alentours, mais elle ne discerna aucun éclat métallique prouvant la présence de guerriers armés. La forêt était pourtant suffisamment dense pour qu’un ou plusieurs archers se dissimulent facilement. Le Bardanos avait-il été repéré ? Les pirates chargés de récupérer l’eau étaient-ils en danger ? Bainas maudit son étourderie. Elle aurait dû être suffisamment sur ses gardes afin de ne pas se faire surprendre comme un vulgaire voyageur. De plus, elle était éloignée de son navire. Si la situation s’envenimait, elle ne pourrait pas faire appel à son équipage.
Bainas reporta son attention sur l’homme qui se dressait à seulement quelques mètres d’elle. Son regard s’attarda sur sa musculature impressionnante et sur sa taille toute aussi démesurée. Un guerrier sans nul doute. Et surement dangereux avec ça. Aussi immobile qu’une statue, la jeune femme le regardait approcher avec suspicion, mains tendues en avant. Quelque chose clochait, mais elle ne parvenait pas à mettre le doigt sur ce qui n’allait pas. Cet homme ne paraissait pas totalement humain. Enfin, c’était un sentiment étrange qui perturbait le pirate au plus haut point.
- Dieu soit loué, enfin quelqu'un dans ce trou perdu ! Et une pirate en plus ! La chance est avec moi aujourd'hui !
Bien qu’elle soit profondément surprise, Bainas masqua ses sentiments derrière une expression impassible. Méfiante, elle pointa son sabre en avant tout en portant un regard circulaire. Bandit ? Embuscade ? Voyageur solitaire ? Elle ne parvenait pas à cerner le guerrier qui lui faisait face. Car, si sa voix était affable, ses yeux, eux, ne souriaient pas.
-La chance, dis-tu ? Il est rare que les Alaviriens parlent de chance lorsqu’ils croisent les Alines et tu ne devrais pas te réjouir trop vite. Qui es-tu et que veux-tu ?
Bainas se déplaça tranquillement vers l’avant, de manière à pouvoir bondir rapidement si l’homme se décidait à passer à l’attaque. Elle ignorait tout de ses intentions, qu’elles soient louables ou non, et elle désirait en apprendre davantage avant de le réduire en charpie.
-Je te préviens, mon gars, ne joue pas au plus malin avec moi ou tu risques de le regretter, ajouta-t-elle avec un sourire carnassier.
Invité
Invité
08.06.14 12:57
Invité
Invité
13.06.14 13:04
Ce type. Un pirate ? Bainas peinait à le croire. En général, lorsqu’elle croisait un Aline, elle le reconnaissait immédiatement. La démarche d’un pirate, ses armes, ses vêtements, n’étaient pas les mêmes que ceux d’un Alavirien. La manière dont cet homme se comportait n’avait rien de pirate. Pourtant… Pourtant, Bainas hésitait. Son sabre, toujours pointé devant-elle, plus efficace que la plus belliqueuse des menaces, décrivait de légers cercles avec la pointe. Elle devait trouver un moyen de s’assurer de la véracité des paroles de son interlocuteur. En tout cas, il semblait bel et bien seul. La jeune femme ne détectait pas la présence de combattants embusqués et cela ne la rassurait qu’à moitié. Si elle devait affronter ce gars, pour une raison ou une autre, elle se savait de taille à relever la gageure. Il avait beau être une montagne de muscle, toute en puissance contenue, elle avait pour elle la finesse, l’habilité, et le maniement du sabre. Elle vrilla son regard smaragdin dans celui de l’homme, tentant d’y déceler une lueur de mensonge ou de fourberie. Ce qu’elle y vit était indéchiffrable. De plus, l’histoire tragique qu’il venait de lui raconter était étrange. A part son récent affrontement avec Orghul, jamais elle ne s’était fait attaquer par des Alines. Si un pirate s’amusait à couler d’autres navires pirates, elle en aurait forcément eut vent. Et surtout, pourquoi ces Alines les auraient-ils pourchassés à terre ? S’agissait-il d’un règlement de compte entre capitaine ? Bien qu’elle soit perplexe, elle ne pouvait pas nier que le cas de figure qu’il venait de lui conter était possible. Non, pas possible, probable. Malgré tout, elle était réticente à l’idée de lui venir en aide. Son sixième sens lui soufflait que ce type était dangereux et qu’elle devait s’en méfier comme de la peste. Et puis, pouvait-on réellement feindre la détresse à ce point ? Elle préféra toutefois jouer la prudence et le tester une dernière fois. Elle voulait être sure de la sincérité de la personne qu’elle embarquerait à bord du Bardanos.
-Je dois t’avouer que je ne suis pas totalement convaincue par ton histoire.
Une idée germa dans l’esprit du capitaine du Bardanos et un sourire furtif éclaira brièvement son visage. Elle savait comment révéler les véritables intentions de cet homme. Si véritables intentions il y avait.
-Ton pavillon, ton nom et celui de ton capitaine. Ensuite, je verrai si je t’aide…
Elle marqua un bref silence et continua d’une voix aussi froide que la mort.
-Ou si je te tue, pour avoir sali de tes mensonges l’honneur des pirates. Aussi vrai que je m’appelle Bainas, je te garantis que je n’hésiterais pas.