Il faisait froid ce jour-là dans la campagne d'Al-Jeit. Bien plus froid qu'à l'accoutumée à cette saison. L'homme qui était là, à l'écart de ce qu'il semblait être une petite bourgade agricole, frissonna malgré sa cape doublée de fourrure. Mais il se reprit rapidement, continuant sa route vers le rassemblement de chariots qui se trouvait en bordure de chemin, à l'abri derrière un bosquet. Il y avait là des personnes de tout genre et de tout horizons. Des marchands, reconnaissables avec leurs vêtements de bon goût et la bourse qui pendait à leur ceinture. Des caravaniers bien entendu, qui s'occupaient de charger les lourdes caisses de provisions dans les chariots. Mais ce qui intéressait plus particulièrement notre homme était la compagnie de soldats et mercenaires qui auraient pour charge de protéger tout ce petit beau monde. Il s'approcha de ce groupe mais manqua de se faire renverser par un gamin qui courait après un chat, comme si l'homme ne l'avait pas vu venir.

Approchant des soldats, ceux-ci turent leurs échanges, intrigués par l'homme en armure de légionnaire et au bandeau au travers des yeux. Celui-ci, satisfait d'avoir eu d'emblée l'attention de tout le monde, s'éclaircit la gorge et d'une voix forte se présenta à ses futurs camarades.

- Je me présente, Esrin Ilïen, capitaine dans l'armée impériale. Vous avez étés engagés ou portés volontaires pour protéger cette caravane. Notre destination, vous la connaissez, est la Citadelle. Pour certains d'entre-vous cela marquera votre premier long voyage vers la Nord de l'Empire. Pour les autres, vous savez que les dangers et les difficultés qui nous attendent sur le chemin seront nombreux.

Le légionnaire, qui s'était présenté anonymement comme un simple soldat, marqua une pause. Les soldats se regardèrent furtivement, certains avaient le regard calme, celui du vétéran et du guerrier aguerri, mais d'autres pointaient une légère inquiétude, comme s'ils n'avaient pas réalisé auparavant l'ampleur de la quête qui les attendait.

Esrin, lui, savait qu'ils étaient loin de tout savoir et qu'en réalité la caravane n'était que l'étape la plus simple d'une longue et périlleuse mission. Loin au Nord, dans les Frontières de Glaces, la situation était inquiétante depuis plusieurs mois. Les Frontaliers et l'armée impériale sur place, chargés de surveiller la frontière avec le royaume des Raïs, faisaient état de mouvements anormaux de ces guerriers cochons vers le Sud. Rien de nouveau à ce niveau là, l'Empire faisait face à des excursions de la sorte très régulièrement depuis des décennies.

Ce qui marquait dans les rapports c'était la présence en grand nombre de femelles et enfants dans ces groupes de Raïs, ainsi qu'une frénésie collective jamais vue de leur part. Ces deux indices laissaient supposer que les Raïs fuyaient quelque chose. Mais quoi ? Récolter des informations était le but de leur expédition.

Comme l'Empire était vaste et que les transmissions d'informations se faisaient principalement avec des coursiers à cheval mais de manière très exceptionnelle avec des dessinateurs, l'Empereur avait décidé de monter en urgence cette caravane, qui devait rejoindre la Citadelle, avec un ensemble de personnages complémentaires pour poursuivre la mission par delà les Frontières de Glaces. Bien entendu, il avait des soldats, dont Esrïn pour représenter la Légion, l'armée d'élite de l'Empereur, mais de manière plus confidentielle la caravane comportait des dessinateurs ainsi que quelques Marchombres. Mais Esrïn ne connaissait pas leurs identités, permettant ainsi de protéger le plus possible leur anonymat, et plus globalement seulement un petit groupe de personne connaissait réellement le but de cette caravane. En réalité il aurait été très peu capable de reconnaître un marchombre qui voulait rester anonyme.

Les murmures avaient commencé à combler le silence laissé par le légionnaire, donc il reprit la parole pour conclure.

- L'hiver approche à grand pas, chaque jour doit nous rapprocher de notre destination, sans détours. Si le froid nous attrape, il sera presque impossible d'atteindre la Citadelle. En plus de l'hiver, d'autres dangers peuvent inquiéter la caravane, la faune, la flore tout est hostile à l'homme dans les Plateaux d'Astariul que nous devrons traverser. Vous êtes ici car l'Empereur croit en votre capacité à lutter contre ces dangers et résoudre les problèmes que nous rencontrerons. Travaillons ensembles pour mener cette caravane à bon port.

Les dernières phrases d'Esrin semblaient avoir diminué l'inquiétude parmi les guerriers, ils se sentaient importants et prenaient pleinement confiance de leur responsabilité. Avec un hochement de tête et une salutation de l'armée, le point serré contre son torse, le légionnaire prit congé de la petite troupe.

Un homme, d'une cinquantaine d'années, attendait un peu en retrait qu'Esrin termine son discours avant de l'interpeler.

- Excusez-moi messire Ilïen, puis-je vous solliciter un instant ?
- Maître Nuil ? Bien entendu je suis tout à vous.

Alan Nuil était le maître caravanier, chargé d'organiser tout ce petit beau monde dans la caravane. Esrin et lui s'étaient déjà présentés plus tôt, il avait donc reconnu sa voix.

- Merci messire. Les dernières caisses ont été chargées, les vérifications ont étés effectuées, tout est prêt de notre côté. Quand partons-nous ?

Le moment était donc arrivé, une nouvelle page dans la vie d'Esrin et pour l'avenir de l'Empire et de l'humanité allait pouvoir être tournée. L'appel de l'aventure donnait des frissons à l'aveugle.

- Donnez vos instructions Maître, nous partons !

[Bon alors vous me direz, parce que je suis assez rouillée et je ne me rappelle plus vraiment de l'histoire de mon perso XD]