Des adieux au lance-pierre

Cali observait, en retrait, les deux hommes qui faisaient face à Myya. La faëlle avait un ton dur qu’il avait appris à connaitre et son attitude dégageait une odeur semblable à celle de la mort, mais en plus séduisante. Oui, il devait avouer que cette créature avait réveillé ses appétits macabres, tant sanguinaires comme sexuels. Elle avait quelque chose qu’il n’arrivait pas à définir, et qui lui plaisait. Il avait toujours aimé les défis, les femmes fortes et au caractère volcanique. C’était dans ces instants où ses émotions se mélangeaient qu’il se laissait enfin aller. Il aimait lorsque la rage se mêlait à la colère, fusionnait avec l’envie et le plaisir, qu’un soupçon de danger et de jalousie s’y ajoutait.
La peau mate, le visage pointu et ses longs cheveux noirs décorés de perles étaient l’exemple parfait de l’exotisme et en cet instant, Caym était fier d’avoir une telle femme dans son tableau de chasse. Non, il n’était pas fier, il se sentait présomptueux et orgueilleux.
Le mercenaire du Chaos finit toutefois par reporter son attention sur les deux hommes qui lui faisaient face. Ses hommes. Il soupira, lassé de leur idiotie. Ils étaient intelligents et ingénieux, toutefois ils étaient incapables de respecter les limites et de les respecter. Ils ne comprenaient pas que leurs actions, tout aussi stupéfiantes qu’elles puissent être, mettaient la guilde tout entière dans une très fâcheuse posture. Et il n’était pas encore l’heure pour le Chaos de se dévoiler. Non, il agissait encore dans l’ombre, il prenait son mal en patience et il attendait son heure. Car elle viendrait, il n’y avait aucun doute. La force des Hommes les pousse sans cesse vers la destruction, alors le Chaos les aide, invisible à leurs yeux, il chuchote dans leurs rêves, il les encourage en silence dans le souffle du vent. Le Chaos est partout, même dans le cœur de cette faëlle, habitée par l’Ombre et dévorée par le goût de la vengeance. Le sang, voilà ce que criait son corps. Et elle l’aurait.

-Cali..

Le Mercenaire du Chaos haussa un sourcil, surpris que ces hommes s’adressent directement à lui. Il regarda leurs yeux pleins d’espoir et ses lèvres se tordirent dans un rictus malveillant.

-Qu’espérez-vous de moi ? Je suis ici pour nettoyer vos bêtises, et vous avez utilisé tous vos jokers concernant vos punitions. Vous avez suffisamment esquivé les conséquences de vos actes alors pense qu’il est grand temps de vous mettre face à votre travail désorganisé et mal pensé. Je vous laisse avec cette fille qui réclame vengeance. Je crois que c’est votre sang qui les intéresse, alors espérez qu’elle vous offre rapidement la mort, car je crains que sinon la peur qui vous tétanise en cet instant ne soit qu’un doux avant-gout de la terreur qui envahira votre bouche et de la douleur qui irradiera dans chaque parcelle de votre corps.

Le regard dur, Caym s’était approché des deux hommes et ceux-ci l’observaient, la bouche entre-ouverte. Ils n’en revenaient pas qu’il les abandonne. Mais le Mercenaire s’en moquait, il avait couvert leurs traces et sauvé leur peau bien trop de fois, cette fois-ci était la fois de trop. Tant pis pour eux.

-On se reverra en enfer.

Sur ces mots, le brun tourna les talons et laissa la Faëlle à ses affaires. Dehors, il s’installa confortablement contre un gros rocher et laissa son regard parcourir le paysage, patientant pour Myya. Ils devaient sceller leur accord avant de se séparer.

-On se reverra en enfer.

Myya avait suivi l’échange entre son partenaire et les deux individus qu’elle tenait en joue. Ainsi elle avait raison, il avait bien été envoyé ici pour nettoyer leurs conneries. Au final cela conférait une certaine sécurité à Myya, avoir la guilde du Chaos sur le dos lui aurait quelque peu posé problème. Mais après tout elle s’en contrefichait, en vérité, la seule chose qui l’obsédait à ce moment même était la mise à mort des deux déchets immonde qui se tenaient devant elle. La haine de Myya était toujours vivace, elle brûlait du désir de vengeance. Les tuer était l’ordre naturel des choses, pour le crime qu’ils avaient commis ils devaient disparaître, n’avoir jamais existé ! En libérant l'empennage de sa flèche, la Faëlle scella leur destin.

« Mourez ... »

Ses mots se perdirent dans le hoquet de stupeur de l’un des mercenaires, le plus petit, le plus maigre, le plus dégoûtant, le cerveau de l’opération, l’assassin direct d’Elya.
La flèche faëlle s’était fichée dans son cou, il n’avait même pas eu le temps de répondre à Cali, Myya ne voulait pas qu’il puisse continuer à parler. Le son de sa voix la dégoûtait, il lui donnait envie de vomir.
Les mains sur la flèche, l’homme avait les yeux écarquillés de douleur tandis que le sang jaillissait de la plaie. Elle avait visé la trachée, lui coupant ainsi la respiration, il s’effondra en s'étouffant dans son propre sang, sous les yeux terrorisés de son compagnon.

Celui-ci se jeta alors sur la Faëlle, l’empêchant d’encocher une nouvelle flèche. Il avait compris que sa maigre chance de survie était de tuer la fille et tenter de fuir Cali. Malheureusement pour lui, Myya n’attendait que ça. Alors qu’il dégaina son sabre et l'abattit à l’endroit où se trouvait la Faëlle, celle-ci se délaça de quelques centimètres vers la droite, évitant habilement la lame de son adversaire. Elle avait lâché son arc et de sa main droite elle saisit le poignet de son adversaire, celui-ci voulut se dégager en se jetant en arrière, mais la Faëlle avait déjà agrippé sa proie. Avec une force insoupçonnée pour une personne de sa stature et corpulence, elle broya le poignet du mercenaire jusqu’à que l’imbécile lâche son sabre.

Mais son adversaire était un Mercenaire du Chaos, formé à la bonne école il était un combattant aguerri, un assassin de l’ombre, un maître de la mort. Il se laissa briser le poignet afin de se dégager de l’emprise de la Faëlle, utilisant sa main gauche pour lui porter un coup direct. Pour l’éviter la Faëlle était obligée de le lâcher, ce qu’elle fit.
Il récupéra alors son sabre dans l’autre main et se remit en garde, prêt à tuer la petite créature qui lui faisait face. Ils se jaugèrent du regard l’espace de cinq secondes, puis le mercenaire relança l’assaut. Sauf que la Faëlle avait disparu.

Myya avait anticipé l’attaque, et avant même qu’il ne décide de se jeter sur elle, elle avait bondi en avant, droit vers le bas-ventre de son adversaire. Quand il se rendit compte que la prochaine attaque viendrait d’en dessous, il était déjà trop tard. La Faëlle avait dégagé son poignard, et l’enfonçant dans l’aine de son adversaire, elle effectua un mouvement brutal et vertical. L’homme se retrouva avec la garde de l’arme au niveau de son thorax, la poitrine ouverte en deux. Sans comprendre il jeta un regard sur la petite chose qui l’avait tué, il mourut avec, pour dernière vision, un regard brûlant d’une haine profonde et d’une satisfaction amère.

Sans un mot Myya regarda d’un air de dégout les deux dépouilles à ses pieds. Désormais Élya était vengée. Plusieurs minutes s’écoulèrent avant qu’elle ne bouge, restant immobile dans le noir Myya goûtait pour la première fois à l’amertume de la vengeance, peu importe que tous les assassins de sa sœur soient désormais en enfer, rien ne lui la rendra. Une larme roula sur sa joue ébène. Quel monde de merde.

Elle essuya alors son poignard pour le ranger, elle traversa quelques mètres pour récupérer son arc, puis se retourna vers son compagnon. Il se trouvait à ses côtés, le regard figé dans le sien il attendait quelque chose. Il se pencha alors pour l’embrasser. Un baiser fougueux et amer à la fois. Elle se laissa quelques instants profiter des lèvres aguichantes de son amant, se prenant au jeu du plaisir. Mais quand ils se séparèrent, ils savaient tous deux ce qui les attendaient.

« Ta part du marché est remplie, je devrais te remercier mais je ne le fais pas... J’honorerais la mienne quand le moment sera venu. »

Puis sans un regard elle se détourna du mercenaire pour s’enfoncer dans la forêt, s’éclipsant dans la pénombre de la nuit.

« Adieu Cali, on se reverra... »

~ Fin du Rp ~