Aelya s’étira, ses membres protestants. Dans ses premières années d’itinérance, après s’être enfuie d’Al-Jeit, elle pouvait marcher à longueur de journée, des jours durant, sans que l’épuisement l’écrase. Depuis, elle s’était trop reposée sur son cheval (qu’elle avait volé peu après être devenue apprentie mercenaire du chaos). Son maître, lui, s’en était rendu compte. Il l’avait donc obligé à partir d’Al-Jeit, à se rendre à Al-Far et à revenir. Tout cela sans s’arrêter sauf pour boire et manger.

Alors que les tours de la cité perçaient l’horizon, Aelya se promit de ne plus faire cette erreur. En tant que future mercenaire du chaos, elle ne pouvait se le permettre. Et son maître voulant s’assurer qu’elle ne l’oublierait pas, son entrainement, ou punition selon l’opinion, n’était pas terminé. Une fois arrivée à la capitale, elle devait le trouver. Tant qu’elle n’y parviendrait pas, Nahil l’attaquerait tout en gardant ses distances (lancée de poignard, flèches…). Elle devrait donc rester alerte jusqu’à ce qu’elle atteigne son but.

Plusieurs minutes plus tard, elle remarqua la présence d’un autre marcheur un peu plus loin sur la route. La tentation de saisir l’un de ses shurikens et de s’amuser avec lui monta en elle. Elle la repoussa — elle connaissait son maître, plus elle prenait de temps à revenir, plus ses attaques seraient sans merci.

Malgré son état de fatigue, elle le rejoignit rapidement. Elle allait le dépasser lorsque quelque chose la dérangea du coin de l’œil. Elle ralentit le pas et le fixa. Plusieurs choses en lui étaient étranges, mais c’étaient ses vêtements qui attirèrent en particulier son attention.

Aelya pencha la tête de côté, tout en continuant de l’observer. D’où venait-il pour être ainsi habillé ? De Gwendalavir ? Elle n’avait jamais vu ce type de tissu auparavant. Un autre continent ? Ou bien…

- Es-tu originaire de cet autre monde ?

Elle connaissait l’histoire d’Ewilan et du monde qu’elle avait habité durant plusieurs années. Elle aurait voulu savoir à quoi il ressemblait, mais elle n’avait jamais rencontré quelqu’un qui s’y soit rendu.

Non seulement il ne lui répondit pas, mais, après l’avoir observé un long, il continua son chemin sans se retourner. Ses pas se firent plus rapides qu’ils ne l’avaient été lorsqu’elle l’avait rejoint la première fois. Aelya n’était pas étonnée, elle avait souvent cet effet sur les inconnus. Elle devait trouver un moyen de ne plus effrayer ainsi les personnes autour d’elle, mais pour cela il aurait fallu qu’elle comprenne ce qui les faisait réagir d’une telle façon. Son maître lui avait expliqué que le problème provenait de son regard, son expression, sa posture, mais elle ne savait pas ce qu’elle devait changer ni comment le faire. Elle n’avait jamais été une bonne menteuse et encore moins une actrice.
 
Son maître comptait bientôt l’entrainer afin qu’elle soit en mesure de faire des missions d’infiltrations. Aelya doutait qu’elle en soit capable, mais si c’était possible elle aurait aimé essayer. L’idée de trahir la confiance de quelqu’un l’avait toujours enthousiasmée.
 
Elle reprit sa marche. Cette fois-ci, elle ne dépassa pas l’étranger, mais le suivit de près, observant chacun de ses gestes. Venait-il vraiment de cet autre monde ? Si elle se souvenait bien, les maîtres qui lui avaient enseigné dans sa jeunesse l’avaient nommée Terre. Drôle de nom. Pourquoi appeler sa planète terre ? Gwendalavir était bien plus élégant.
 
Aelya aurait aimé continuer à poser des questions au garçon, mais après le regard qu’il lui avait lancé, elle se doutait qu’il ne répondrait pas. Peu importe, elle le suivrait. Étant donné ses vêtements, il devait avoir fait le Grand Pas récemment, il ne savait donc probablement pas où il se trouvait. Tôt ou tard, il viendrait la voir pour lui demander.
 
Le temps passa, la capitale se rapprochant davantage. Depuis un moment, son attention était attirée sur l’étrange veste de l’inconnu. Se demandant quel genre de texture pouvait avoir un tel tissu, elle étendit le bras et toucha la veste du bout des doigts.